•   La musique résonne d'une puissance incroyable dans mes tympans. C'est pas désagréable, ça compense même le vacarme de tous les gens dans la pièce. Cela fait peut être une heure que je suis recroquevillée sur un pouf avec cette boisson un peu bizarre a la main. C'est un mélange de Monster, de sucre, de citron et de vodka. J'en ai bu quelques gorgées, c'est doux et acidulé, mais savoir qu'il y'a une certaine dose d'alcool m'empêche de finir le verre. Je ne me rappelle même plus du nom de ce mélange. Je m'isole totalement du reste de la population rien que pour essayer de retrouver ce nom, mais je je m'en rappelle pas. Des mains brûlantes se posent sur mes joues, et quand je relève la tête, je vois Ellie, avec un visage ultra souriant, comme si elle portait tout le bonheur du monde à travers ce sourire. Elle approche son visage de moi et me dit, assez fort pour que je l'entende : «Amy, l'alcool, ça fait des miracles.» je hausse un sourcil, notamment parce que je pense tout le contraire. Elle m'attrape le bras libre et elle me tire. Je manque de tomber et je renverse mon verre par terre. Tant pis. Ellie me tient fermement, elle me fait presque mal, mais peu importe, elle me tient, au moins. Elle m'entraîne au milieu de la foule, et se met à danser d'une manière un peu ridicule, mais je m'en fiche, je me laisse me faire entraîner par ces gestes. On se met à rire, on se tient la main, on se lâche, on s'enlace presque, on enchaine les pas de danse un peu n'importe comment et on profite un peu d'une étrange complicité qui s'installe au fur et à mesure qu'on se touche, qu'on s'attrape, qu'on se lâche ou que l'on se retient.  Finalement elle m'attrape par la taille et me colle à elle, et je me demande si elle sent mon coeur qui bat, tellement il résonne fort à travers mes oreilles, plus fort que la musique encore. Elle fait passer une main dans le bas de mon dos, et en remonte une autre sur mon visage. Je me sens étrangement à l'aise, j'ai l'impression que sa peau est faite pour aller avec la mienne, bien que son contact me procure des frissons et m'étonne un peu. Son visage se rapproche du mien et je décide de bouger maladroitement mes mains. Je ne sais pas trop où les mettre, et elles se placent d'elles même dans son cou, mes doigts se nouant dans sa nuque. Elle finit par me murmurer: «Amy, putain, Amy, tu n'as pas envie de me taper pour tout ce temps que j'ai passé avec toi sans céder à toute la sensualité que tu dégages ?» 
    même si c'est un murmure, je l'entends parfaitement, et je me mets à rire bêtement. Elle a jamais dit quelque chose d'aussi idiot, mais l'alcool doit avoir une légère influence. Même si, pour dire que je suis sensuelle, il faut vraiment avoir beaucoup bu. Mais qu'importe, elle se rapproche encore plus de moi et sourit. «On dira que c'est la faute à l'alcool, d'accord? Mais t'es décidément trop parfaite pour que je me contente de te faire un simple câlin amical.» Mon coeur bat encore plus fort que la grosse caisse de la chanson qui est en train de passer, je me sens devenir toute rouge à ses stupides phrases qui ne veulent rien dire, des milliers de mots parcourent mon esprit jusqu'à ce que je sente ses lèvres se presser contre les miennes. Je sens seulement une étrange sensation dans mon ventre, et quand je ferme les yeux des milliers de couleurs défilent devant mes paupières, et je ressens rien d'autre que le besoin d'arrêter le temps à ce moment. Nos corps se serrent un peu plus l'un contre l'autre et j'ai l'impression qu'entrelacées de cette manière, elle et moi ne forment qu'une seule et même personne. 
    Je rouvre les yeux timidement et elle me sourit. Elle me prend cette fois ci la main, et ce d'une manière plus douce et l'entraîne à travers la foule. Ses doigts glissent à travers ma main alors je resserre mon emprise. Elle se tourne vers moi et un sourire joueur se dessine sur ses lèvres. Elle me lâche la main et se met à courir à travers les gens, en se dirigeant à l'étage. J'essaie de la suivre, de la rattraper, mais j'ai beaucoup plus de mal à me faufiler qu'elle, les gens se placent entre elle et moi, ils me bousculent, m'attrapent ou au contraire, me poussent loin d'eux. J'atteins finalement les escaliers et le couloir qui se dresse devant moi me laisse perplexe. J'ouvre chacune des portes avec précaution et pour la plupart, je les referme aussitôt, avec un incroyable sentiment de gêne. Dans la première pièce, un couple se déshabillait sauvagement. Dans la deuxième, un garçon et une fille se font tourner des joints. La fille avait l'air totalement défoncée et le mec avait l'air de vouloir en profiter. Dans la troisième salle, deux hommes se bousculaient de manière un peu étrange, et j'ai évité de justesse un caleçon qui volait. J'enchaîne ainsi les pièces, étonnée de chaque chose que j'y trouve dans chacune des chambres. Une me tient tête et est fermée à clef, ce qui m'étonne un peu. J'arrive au bout du couloir et je n'ai pas trouvé Ellie. Elle a du redescendre. Je me retourne et reprend le chemin inverse. J'entends une porte s'ouvrir, et, sans immense surprise, c'est celle qui était, quelques minutes plus tôt, fermée à clef. J'entre prudemment dans la chambre mais je n'y trouve aucune trace d'Ellie. Je me dirige vers le lit, au centre de la pièce, et je chuchote bêtement son nom.
    La porte se referme derrière moi. 
    Ses mains se posent sur mes yeux et elle m'embrasse sur la joue. Je tourne mon visage vers elle en souriant et je tends ses lèvres vers les siennes. Je ne sais pas si elle sait que je suis parfaitement sobre, ou si elle est trop alcoolisée pour y réfléchir. Elle descend ses mains sur mon bas ventre et quand je l'embrasse, ses doigts détache le bouton de mon mini short et le fait tomber en glissant ses mains le long de ses cuisses. Je n'aime pas trop cette idée là, mais je dis rien pour le moment. Elle remonte ses mains en faisant glisser ses doigts le long de ma peau une fois le short tombé. Ils attrapent habillement le bas de mon t-shirt et voilà qu'elle le remonte. Je me retiens d'inspirer un grand coup, et je ne sais pas pourquoi, par peur, peut être, ou par honte, je me laisse totalement faire. Pourtant, je n'en ressens pas l'envie. Je me sens particulièrement gênée face à mon corps. Je crois qu'elle a ressenti mon gêne, car une fois en sous vêtements, elle s'assoit, m'attire contre elle et me câline pendant dix, vingt minutes, en m'embrassant de temps à autre un peu partout sur le visage. Elle balade de temps en temps ses mains le long de mon corps.
    Qu'est ce que je suis en train de faire? Je ne me sens pas prête pour faire ce genre de choses. Et puis, c'est stupide de faire ça un soir où elle n'est même pas sobre, un soir où c'est son envie qui la guide plus que ce que son coeur ne le devrait. Pourtant, chaque geste qu'elle fait me rend vulnérable. Ses mains, ses lèvres, tout me fait fondre, toute cette affection me donne une impression de paradis. Et cela se ressent dans mon sourire et dans ces étranges soupirs que je laisse échapper d'entre mes lèvres.
    Il lui arrive de remonter ses mains le long de ma silhouette, et j'ai envie qu'elle fasse ça en boucle. Elle le fait d'une manière douce et très agréable. Ses baisers sont délicats, ses lèvres pourraient rester la nuit entière dans mon cou, cela ne me gênerait pas. Au contraire. Dès qu'elle les éloigne, je passe ma main a l'arrière de sa tête et je sens le besoin de lui faire comprendre que je ne veux pas qu'elle s'arrête. Et lorsqu'elle le fait, elle me murmure des mots à l'oreille. Mon cerveau est embrouillé et la seule phrase que je retiendrai est «Je t'aime.» lorsqu'elle prononce qui font chavirer mon coeur et grandir un sourire, j'oublie toute la gêne que me retrouver si peu habillée en face d'elle me procurait, et j'oublie de réfléchir. Je cherche ses lèvres avec les miennes, je la fait basculer sur le lit et je m'allonge de tout mon corps sur elle. La pièce est extrêmement calme, je n'entends que nos souffles lents et détendus alors que la musique hurlait, en bas. 


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  • le lendemain qui correspond aux textes du réveil :

    On me réveille à 9 heures en me servant un petit déjeuner composé d'une compote, d'un bol de céréales, de deux gâteaux et d'un jus de fruit. Je n'ai pas touché au plateau, l'anxiété ou la contrariété me coupe l'appétit pendant une bonne demi heure. Les gâteaux font finalement exception. Elliot n'est pas là et je me suis réveillée seule ce matin. Je ne peux bouger que mon bras droit et une infirmière m'aide à ouvrir mon paquet de gâteau. Elle est assise au bord de mon lit. Elle a des cheveux châtains foncés, des yeux marrons clairs et une peau métisse. Ses cheveux sont bouclés et très jolis. Elle est jolie. Elle a un sourire agréable à regarder, aussi. Elle me dit gentiment qu'elle s'appelle Erin et qu'elle sera avec moi tout le temps où je serai la, et qu'elle m'aidera. Je mange mon gâteau silencieusement. 
    Ce matin, on ne m'embête pas trop. On me laisse me recoucher si je le souhaite, ce que je fais dans un premier temps. Je désire ensuite aller me doucher et m'habiller et Erin m'aide à me lever et à marcher. Je me sens tellement fatiguée et faible que j'ai beaucoup de mal à tenir debout. On ne m'a pas remis de cathéter mais mon bras est toujours entouré de bandages. La jeune femme me déshabille lentement en prenant soin de ne pas me faire mal – je me sens affreusement gênée. Lorsque je me retrouve en sous vêtements, elle me dit que si je ne veux pas qu'elle me voit nue, je peux les garder. Je secoue la tête en haussant les épaules. Après tout, c'est elle qui va rester avec moi, et apparemment, pendant un bon bout de temps, alors autant oublier la pudeur. Je ne peux quand même pas m'empêcher de rougir lorsqu'elle m'aide à baisser ma culotte. Je m'assois tant bien que mal dans la baignoire, et elle me propose de prendre un bain, ce que j'accepte volontiers. Elle fait alors couler l'eau chaude et m'explique qu'elle va devoir refaire mon bandage tous les jours, afin de désinfecter la plaie et aider à cicatriser. Elle semble parfaitement au courant et cela me gêne profondément. Je me contente de hocher la tête et je demande si je peux avoir de la mousse.
    Une demie heure plus tard, Erin me nettoie le bras gauche pendant que je somnole encore dans le bain. Je grimace souvent et même si elle est très douce, ça fait mal. Je n'ai presque pas osé regarder mon bras. Lorsqu'elle a terminé, elle me félicite pour avoir été patiente et pour ne pas avoir trop bougé. Elle me demande si je veux de l'aide pour me laver et je lui demande juste de me laver les cheveux. Je me tourne dos à elle et pendant qu'elle me masse doucement le cuir chevelu avec du shampooing, je me débrouille pour laver mon visage et mon corps - en évitant soigneusement l'avant bras gauche. Erin se met alors à me parler de chatons qu'elle a depuis quelques jours à sa maison. Je sens dans sa voix qu'elle est émerveillée de cet événement. Elle me dit qu'elle me montrera des photos. Elle me raconte alors comment elle s'est débrouillée lorsque la chatte a mis bas, et comment elle s'occupe des bébés. Ça me change les idées et je ne pense plus à rien qu'à ces chatons.
      Je me rassois avec un peu de mal sur le lit, les cheveux secs, frisés et coiffés. J'ai réussi à m'habiller d'un débardeur The Pretty Reckless et d'un short. Erin m'a expliqué que mon «amie brune» m'avait fait une valise avec des habits que j'aimais bien. Je demande à Erin si elle ne va pas s'ennuyer, toute la journée ici.
    « J'ai une pause dans la matinée, je peux manger soit ici soit avec mes collègues et tu as toute ton après-midi de prise, alors je ne reviens que pour une heure, peut être deux, et je rentre chez moi le soir. »
    Elle me voit hausser un sourcil lorsqu'elle évoque l'après midi. Elle inspire longuement avant de déclarer « Un psychologue va venir de 14h à 18h, je crois. C'est ta mère qui l'a demandé. » autant de temps ! Mais je ne compte pas répondre à ses questions pendant 4 heures ! Je sens une boule au ventre surgir et le stress monte en moi. Erin pose sa main sur mon épaule et me dit qu'elle va faire sa pause. Elle me demande si je veux quelque chose.
    « – Mon téléphone, s'il te plait. »
    Elle se mord la lèvre. Mardi après-midi, quand je me suis réveillée, mon téléphone était sur la table de chevet. Depuis, il a disparu. Il a un code mais j'ai bien peur qu'ils aient réussi à le supprimer pour fouiller ma vie privée. “mes écrits...”, pensé-je alors avec une pointe d'énervement. 
    Elle essaie de m'expliquer calmement que je n'ai pas le droit d'être en contact avec de l'extériorité d'une manière ou d'une autre, mais je fonds rapidement en larmes. « Je veux juste ma musique ... ! », balbutié-je en essuyant mes larmes. Elle passe sa main dans mon dos, me tend un mouchoir et déclare:
    « Je vais voir ce que je peux faire. Je reviens dans 15 minutes, ne bouge pas.» elle pose alors quelques livres sur la table. « Tu veux lire? Je peux t'allumer la télé ou te mettre un film, si tu veux. » je secoue la tête et attrape un livre pendant qu'elle s'éloigne. Bien que j'essaie de me concentrer sur le livre, mes pensées s'embrument à travers plein de questions. Je songe alors à Ellie, et au lycée. Si on a seulement dit que j'étais malade. Je me demande si Ellie est allée en cours. Elle avait l'air tellement décontenancée quand je l'ai vu. Peut être qu'elle a préféré rester chez elle, pour être plus tranquille. Ou alors, têtue comme elle est, elle s'est endettée à supporter les interrogations des gens de ma classe. J'espère seulement qu'ils ne savent rien. On me traite avec une pitié incroyable depuis que je suis la, alors j'espère juste que lorsque je retournerai au lycée, ce sera comme si de rien était. 


      L'après midi arrive bien trop rapidement. Je n'ai presque pas mangé malgré Erin qui a mangé avec moi, et qui me suppliait presque pour manger un morceau. J'ai fini par cédé et j'ai mangé un tout petit morceau de viande. Il m'a très rapidement donné envie de vomir alors je me suis contentée de ça. Le psychologue frappe à la porte à 14h pile. Erin m'explique qu'après, j'aurai de la visite. “Génial”.

      Pendant la première demie heure, il m'a posé des questions simples auxquelles je réponds sans trop de problèmes. 
    « – Comment t'appelles tu?
      – Amy.
      – C'est un joli prénom. Qui a voulu t'appeler comme ça ?
      – Mon père.
      – Comment s'appelle ton père ?
      – Keith.
      – Et ta mère?
      – Lacy. 
      – As-tu des frères et sœurs?
      – Non. 

    Il dessine alors un cercle, inscrit le prénom de mon père dedans, puis inscrit celui de ma mère dans un cercle à côté. Il relie les deux cercles ensemble, trace un trait qui descend et le relie à une troisième bulle où il écrit mon nom. Il relève alors la tête et me regarde. 

       – Quel âge as tu, Amy?
       – 14 ans. 
       – Tu es donc en première année au lycée?
       – Oui.
       – Tu as une matière préférée ?
       – Anglais, Français et Musique.
       – Tu peux me dire quelque chose en français, alors? 

    Je me tais. Je ne sais pas trop quoi lui dire. Ses questions sont simples, pas très stressantes et pourtant, je me sens toute raide, tendue et nerveuse. Je n'ai pas très envie de parler de moi mais il est gentil, alors pour le moment je me suis contentée de répondre à ses questions. Mais j'appréhende déjà les questions un peu plus personnelles. Il n'y a que lui et moi, dans la pièce, pour ne pas que je me sente "mal à l'aise en présence d'autres personnes". J'aurais malgré tout bien aimé qu'Erin soit la. Je finis par lui secouer la tête négativement avec pour seul argument que j'ai un mauvais accent. Il ne s'attarde pas et continue sa série de question.

     – Tu joues d'un instrument de musique, non?
      Je hoche brièvement la tête en fixant son papier sur lequel il écrit tout.
     – De quel instrument joues-tu?
     – De la batterie.
     – Depuis longtemps?
     – Presque aussi longtemps que les débuts de ma mémoire.
     – Tu joues bien, alors?
    Je hausse les épaules nonchalamment. Il change alors brusquement de sujet, en se penchant un peu plus sur la table.
      – Tu te sentais bien, au lycée?
    Je relève soudainement le regard vers lui, et je regrette de ne pas être maquillée pour faire plus d'effet. J'attrape un stylo et me mets à le triturer. Il inspire longuement et reprend:
      – Tu avais des problèmes ?
    Je ne réponds toujours pas. Je ne souhaite pas répondre à ce genre de questions et je ne le ferai pas. Il repose la question une deuxième fois d'un air plus menaçant. Je le tue du regard et les mots sortent tous seuls:
      – Et vous, vous vous sentez bien dans cet hôpital à parler à des gens malsains toute la journée? Vous avez des problèmes, aussi? Ça ne m'étonnerait pas que certains se jettent à votre cou pour vous faire taire, vous et vos questions indiscrètes.
    Il se redresse, stupéfait, puis attrape soudainement le stylo que je tiens dans la main, ce qui a pour effet de m'arrêter net dans tout mouvement. Je baisse les yeux vers le stylo en me mordant la lèvre. Il me l'arrache avec une vitesse incroyable, m'attrape le menton et me fait le regarder droit dans les yeux. Je me sens me remplir de rage et de haine, et lorsqu'il se remet à parler, des larmes coulent subitement sur mes joues.
      – Tu ne peux pas jouer à ce genre de choses avec moi, Amy. La provocation ne marche pas. Je ne sortirai pas d'ici tant que je n'en aurai pas appris un peu plus sur toi. A toi de collaborer si tu veux être tranquille, maintenant. »
    Ses mots me clouent sur le lit et je reste pendant une bonne quinzaine de minutes sans rien dire afin de réfléchir. Il est évident qu'ici je suis prise pour une folle, et que je ne veux pas rester dans cet environnement semblable à un asile. Je finis par redresser mon regard vers lui et je lui crache à la figure : « Bhen vas y, dépêche toi de me poser des questions, de conclure à ma mère que je suis tarée et d'empocher l'argent. »
    Il ne relève que la première partie de ma provocation mais je sens dans son regard qu'il est irrité, malgré le fait qu'il essaie de rester impassible. Je me penche vers lui et lui chuchote, prise d'une incroyable fierté sur mon caractère de pétasse sur développée : « Je lis dans les regards, vous savez. Et ça me conduit souvent à lire dans les pensées. »
    Je me redresse et je tire enfin un sourire, mais c'est loin d'être un vrai. Non, c'est un sourire provocateur, ironique et rempli de méchanceté que je tire la. Mais je m'en fiche.

    « – Qu'est ce qui s'est passé cette semaine de particulier pour toi ?

    “Ellie m'a abandonné”, pensé-je. Mais je n'ai plus très envie de la jouer gentil. Pourtant une partie de moi me dit de faire attention et de ne pas jouer avec le feu.
    Ma partie autodestructrice lui rit au nez. Comme c'est ironique.

    « – Je suis amoureuse. Et la personne dont je suis amoureuse m'a abandonné après 8 mois à me faire croire qu'elle m'aimait. Ça fait 3 ans que je suis victime d'harcèlement. Mais cette année cette personne m'aidait. Sauf vendredi, où on m'a coincé dans les casiers du couloir après les cours pour me cracher à la figure et me forcer à manger un papier avec écrit “Je suis tellement laide et stupide que je mérite la mort.”, Oh, et, je crois que ma mère a un amant et qu'elle ne veut pas me l'avouer. J'ai appris avant hier que la personne que j'aime sort avec quelqu'un que je déteste, aussi. En gros. »

    Il reste stoïque pendant quelques minutes avant de se mettre à soigneusement tout noter sur sa feuille. Il reprend alors point par point.

    « – Tu n'as jamais parlé de tes problèmes concernant le harcèlement ?
      – Non.
      – Tu as une raison pour ça? Comme des menaces?
      – Pas spécialement. Je suis juste trop têtue pour aller me plaindre à papa maman ou madame la principale.
      – Tu penses donc que pour ton image personnelle, c'est plus digne de souffrir en silence?
      – J'ai toujours souffert en silence. »
    Je le vois griffonner sur son papier “Perturbée” puis “troubles psychologiques”. 
    « – Que veux tu dire par la?
      – J'ai jamais aimé ma mère et j'ai toujours préféré mon père. Sauf que celui ci à été assez con pour partir lorsque j'avais 10 ans. J'ai pleuré chaque soir, pendant une heure, durant un an, en attendant son retour. Ma mère a enchaîné les coups d'un soir et les histoires d'une semaine, au grand maximum un mois. On ne parlait presque jamais, elle et moi, nos discussions se sont toujours résumées à des regards assassins. À partir de ma deuxième année au collège j'ai commencé à me faire harceler par des filles et je n'ai rien dit parce que j'ai pensé que ça s'arrêterait l'année suivante. Toutes mes années collèges j'ai été seule. Vraiment seule. Je ne mangeais pas le midi parce que c'était la honte de n'avoir personne avec qui manger. »


    Je marque une pause et je le regarde noter des mots clefs comme “solitude” “renfermée” “situation familiale bancale”. Je sens la rage s'accumuler en moi, une rage contre le monde entier. Je me sens m'énerver et je me dis qu'ici, ce n'est pas grave si je n'arrive plus à me contrôler. Je me rends compte que rien ne m'est important à présent. Ma tentative de suicide n'a pas marché mais ce n'est pas pour autant que je suis vivante.
    Tout mon être intérieur est mort depuis longtemps.
    Encouragée par l'énervement et l'autodestruction j'arrache le bandage qu'Erin m'a fait quelques heures plus tôt. Ça tire et ça fait horriblement mal mais je me contente de grimacer et de retenir tout bruit qui pourrait me trahir. Je pose mon coude sur la table et montre mon avant bras au psychologue.
    « On vous a parlé de ça? De mon bras? » je lui montre le grand trait qui remonte tout le long de ma veine. « ça c'est parce que j'ai voulu mettre fin à ma vie. » Je passe rapidement mes doigts sur les centaines de traits horizontaux. « Ça c'est pour me punir de vivre, d'être stupide, laide, incompétente, égoïste, lunatique, possessive, jalouse, égocentrique et j'en passe. J'en ai tracé plus de trois cents pendant 3 ans. Mais elle, elle m'avait fait arrêté. Jusqu'à Lundi, du moins. Vous vous rendez compte du mal que l'on peut s'infliger? De la peine que l'on ressent et de la douleur que l'on s'inflige sous l'influence de gens qui nous écrasent constamment? Vous trouvez ça normal? En 3 ans ma mère n'a jamais remarqué mon automutilation, en 3 ans ma mère n'a jamais vu ou prêté attention à mon mal être. Alors quand quelqu'un arrive et prête attention à vous et votre santé mentale ou physique, vous tombez amoureuse. Inévitablement. Et vous crevez lentement parce que ce n'est pas réciproque. »
    Je repose mon bras sous le regard stupéfait et je constate que ma paume de main saigne tellement j'ai serré les poings. Des larmes coulent sur mes joues mais je n'ai jamais eu de petite voix. C'est seulement la haine et la rage en moi qui vient de s'exprimer, enfin, mais ce n'est pas pour autant que je me sens soulagée.
    « Ça suffit, maintenant. »
    J'attrape un livre et je n'accorde plus aucune attention au psychologue. J'ai assez donné pour aujourd'hui et probablement pour le reste de la thérapie. Il se lève, encore sonné de tout ce que j'ai pu lui crier à la figure et sort de la pièce, me laissant seule dans un état où l'on ne doit pas me laisser seule. Je fais violemment basculer la table et je me recroqueville contre moi même en pleurant bruyamment. J'ai l'impression de ne rien faire d'autre que ça, ces derniers temps. Je ne savais même pas que c'était possible de pleurer autant en si peu de temps. Ma rage n'est plus là, je me sens à présent remplie d'une tristesse sans fin et je me sens inconsolable. 
                   
                              ****


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  • (suite de ce texte)

    J'entends une porte s'ouvrir et un cri paniqué me briser les oreilles. J'entends quelqu'un crier mon nom et me secouer dans tous les sens, je la sens me toucher le visage, pleurer, hurler «Ne pars pas, me laisse pas, t'as pas le droit de me faire ça». Mais je suis déjà partie. Tout est noir mais j'entends tout, je ressens tout, alors que je ne le devrais pas. Je suis incapable de faire le moindre geste même si je le voudrais. J'entends cette personne fouiller dans son sac et appeler quelqu'un au téléphone, puis j'entends le 911 écouter la voix tremblante de la personne à côté de moi.
      Des personnes courent dans les escaliers et s'activent autour de moi. On m'allonge sur le dos, on me tire le bras, je sens une tête se poser contre ma poitrine avant de me faire un massage cardiaque. Ça fait mal. Je veux me débattre, partir, leur hurler de me laisser tranquille, j'ai envie de pleurer mais je suis incapable de faire quoique ce soit, c'est comme si je regardais un film, mais que j'étais le personnage de ce film et que je regardais les actions se dérouler autour de moi.
      J'entends une autre voix crier «Elle ne respire plus, j'entends plus son coeur battre» et la personne qui était seule avec moi semble inconsolable, je l'entends sangloter un peu plus loin. La personne a côté de moi hurle pour demander le défibrillateur, et je m'entends répéter «Non, non, non» parce que j'ai peur d'avoir mal. Je veux serrer ma main très fort même si je sais que je tiens encore le cutter. On arrache ma chemise et je sens quelque chose de très froid se poser sur mon buste, et dans ma tête, je grimace de douleur. J'entends une machine faire du bruit, quelqu'un compte et une décharge traverse tout mon corps avec une douleur qui me donne l'impression qu'elle ne partira jamais.

    Je me réveille en sursaut et en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je me suis levée brutalement et je n'arrive pas a tenir assise, mes bras ne veulent pas me supporter. Je tousse et je crache encore du sang, et je me vois basculer vers la droite et tomber par terre en hurlant. Dans ma chute mon cathéter au bras gauche s'est arraché et je saigne. Il fait noir. J'entends quelqu'un se réveiller et il se baisse vers moi et me prends dans ses bras en appelant un médecin. Je suis inconsolable et je me rends compte que je pleure bruyamment et sans arrêt. On me berce comme si j'étais un bébé. Ma tête se repose sur l'épaule de la personne qui me tient. Elle est large, elle est confortable, on dirait qu'elle est faite exprès pour qu'on pose sa tête dessus. L'odeur m'est vieille et familière mais je n'arrive pas à me souvenir d'où elle provient et la première chose à laquelle je pense est «papa ?»
    On est en pleine nuit et j'ai du réveiller tout le monde. Un médecin arrive et la personne qui me tient s'assoit sur mon lit. Je ne sais même pas qui elle est et de quelle droit elle se permet de me tenir comme ça. Je sais juste que c'est un homme. Je n'ose pas bouger, au contraire, je me réfugie dans ses bras qui me rappellent des vieux souvenirs. Sa main passe doucement dans mon dos et me caresse. J'entends le médecin lui demander ce qu'il s'est passé pendant qu'au loin j'entends quelqu'un au téléphone avec ma mère. J'étouffe mes sanglots dans le t-shirt de l'homme et lorsque j'entends sa voix, son prénom me revient automatiquement, comme si je l'avais toujours su, et je m'entends bafouiller «Elliot» au milieu de toutes mes larmes. Je le sens sourire et la seule chose que je pense sur le moment est "j'ai une bonne mémoire". Le médecin veut me remettre rapidement le cathéter mais Elliot lui dit de me laisser tranquille pour la fin de la nuit.
    Il continue de me bercer et je referme les yeux, je me sens apaisée par ses gestes doux. Pourtant, dès que mes paupières se ferment, je me revois tomber dans la mare de sang et mon ventre se tord. Je rouvre immédiatement les yeux et je n'ose plus me laisser aller au sommeil.


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  • Ceci est un écrit que j'avais publié sur tumblr, que je republies ici. C'est un brouillon d'un mini roman sur lequel je travaille. Il raconte la vie d'Amy, une ado américaine, sa passion pour la musique et surtout son premier amour..

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    "Je sens une lumière transpercer lentement mon âme. Elle est puissante, brillante, attirante, mais tellement blessante à la fois. Elle me fait mal. Elle me repousse à fermer les yeux. Je n'arrive pas à les ouvrir.

    Mes sens sont brouillés, je n'entends rien, ne vois rien, et je ressens rien. Ma tête est vide. Mon corps est vide. Toute mon âme est vide. Je sens juste un gout amer me remonter le long de la gorge. Je me penche et je vois le sang couler le long de ma lèvre pour s'étaler au sol. Je commence à entendre des voix. Des bruits de pas, qui courent de part et d'autre de la pièce. Certains de manière active. D'autres traînent. J'ai la vague impression d'entendre des chagrins. Et je me rappelle rapidement que personne ne pourrait éprouver du chagrin pour moi. La première chose que j'entends distinctement est ma propre voix. J'arrache ma gorge à tousser, à cracher du sang et à essayer de respirer normalement. Je sens une main pressée mon épaule gauche et me repousser de force. La lumière m'aveugle à nouveau. Je tourne légèrement la tête et constate que mes bras sont couverts de bandages, et que celui de gauche est relié à une perfusion. Ma tête se met à tourner à nouveau alors que je sens quelqu'un accourir a côté de moi. Je sais qui court comme ça. Qui se précipite comme ça. Alors je me laisse à nouveau me faire avaler par le sommeil, parce que c'est bien mieux comme ça que de la voir.

    J'aimerais que la mort m'emporte comme le sommeil l'a fait.

    Lorsque je me détache à nouveau du sommeil, je me dis que c'est presque pire. Je reprends rapidement mes sens. Je ne me sens pas malade, physiquement. Mais la première chose que je vois, c'est sa tête, posée à quelques centimètres en dessous de la mienne. Elle est allongée, sur le même lit que le mien et il semblerait qu'elle se soit assoupie. Je la regarde pendant une dizaine de minutes sans que rien n'arrive à sortir. Pas de boules dans la gorge, pas de larmes qui coulent. On dirait une personne sans âme et sans émotion. Peut être suis je trop endormie, trop fatiguée, ou même trop morte pour ressentir la sensation la plus humaine qu'il existe. J'inspire longuement, puis je tourne la tête vers la table de chevet. J'attrape discrètement un téléphone et je constate qu'on est mardi, 18h et des poussières.

    Je commence à m'interroger sur la fin de ma journée d'hier. Je sais déjà que le pire est arrivé, mais je me perds dans mes pensées tout de même. Les conséquences de mes actes, par exemple. Je sens que les prochaines journées vont être longues. Et rien qu'en pensant ça, je me sens déjà fatiguée de vivre. Je souhaite me lever, marcher, je souhaite déjà m'évader. Cette chambre ressemble à une prison. Les murs sont tous blancs, et j'ai l'impression que l'on m'observe. En effet, dès que l'on tourne le regard vers la sortie, on aperçoit une vitre de la longueur du coin du mur jusqu'à la porte, et je devine des silhouettes. Je me demande si l'on me considère comme un monstre.

    Je deviens subitement nerveuse. J'ai été mise à nue face à eux. Mes blessures, mes brûlures, et évidemment le nombre impardonnable de cicatrices le long de mon bras... Tout cela va susciter des longues heures de questions auxquelles je n'ai pas envie de répondre. Évidemment, la nervosité s'accompagne de l'appréhension. Mes pensées sont envahies par les milliers de réflexions que ma mère va pouvoir me faire. Je me sens déjà incapable de surmonter ça. Je me sens toute aussi incapable de reprendre une vie normale après ça. Que savent les gens, au lycée? Que pensent-ils?

    Mon regard se tourne à nouveau vers elle, et je me dis que le pire à venir est avec elle. Pourquoi est-elle là? Pourquoi se soucie-t-elle de moi? Je n'ai pas le courage de sentir ses yeux posés sur moi. Je ne veux même pas sentir ses mains contre mon corps. Je ne veux rien sentir d'elle. Est ce que ce que je ressens pour elle a été mis à nu? Est ce la raison pour laquelle on va me considérer comme une bête folle et perdue de raison? Est ce que l'on va me penser malade? Est ce que l'on va chercher à me guérir de quelque chose qui n'est même pas une maladie, seulement une ouverture d'esprit? Et elle. Elle. Qu'a t'elle dit à propos de nous. Je brûle d'envie de le savoir, mais j'en suis bien trop effrayée pour le savoir maintenant.

    Je l'entends expirer longuement et je me dis que si je ne mime pas le sommeil je vais devoir vivre un enfer. Mais je ne ferme pas les yeux. Je reste simplement allongée, je garde regard sur la pièce en elle même. Sur la télévision, les affaires posées sur les différents sièges. Je me sens trembler petit à petit, et je me surprend même à sursauter lorsque sa main se place derrière ma tête. Je ne tourne pas le regard. Je n'y arrive pas. Je ne veux pas voir ses yeux. Je ne veux rien ressentir pour elle. Pas de pitié, d'étrange joie éphémère et encore moins de l'amour. Je sens son visage se terrer dans mon cou et je l'entend pleurer. Ses larmes coulent le long de mon cou et je trouve maintenant cette sensation encore plus désagréable qu'avant. Elle ne m'est plus désagréable parce que je n'aime pas la voir en pleurs. Elle m'est désagréable car elle me montre à quel point je suis incapable d'apporter autre chose que de la peine. À travers ses sanglots je l'entends murmurer milles excuses à mon oreille. Elle les répète indéfiniment, de plus en plus vite et de plus en plus fort, sans pour autant arrêter de laisser couler ses larmes. Elle finit par m'attraper le menton et me force à tourner la tête vers elle. Je la sens me fixer dans les yeux alors que je baisse les miens, par peur, par gêne et surtout par honte. Elle se rapproche encore plus de moi, et j'ai envie de me dégager, j'ai envie de la repousser, mais je n'en ai pas la force. Je n'ai jamais eu la force de la repousser dans tout ce qu'elle a fait. Elle inspire profondément avant de chuchoter "Est ce que tu me hais?" J'ai envie de lui répondre que oui, je la hais. Je la hais pour ce qu'elle m'a fait, pour le mal qu'elle m'a fait ressentir et pour le mal que je me suis fait par sa faute. J'ai envie de lui répondre que la seule chose que je ressens en la voyant c'est cette haine qui me pousse à me détacher de ses mains. Je me rassois sans un mot, je trouve le courage de la repousser, et pendant qu'elle s'assoit à son tour, je réponds: "Je t'ai trop aimé pour ne pas te haïr comme je souhaite te haïr maintenant." Je sens ma voix se briser alors je m'arrête la, je tourne le regard vers la table de chevet de gauche et j'observe un papier. Je l'attrape sans prêter attention à ses sanglots et à ses pas, je la laisse franchir la porte sans lui accorder un regard.

    Je sens la rage qui monte en moi au moment même où j'entends la porte se fermer. Pourquoi l'ai-je rejeté alors que j'aurais pu avoir peut être l'infime chance d'être aimée ? Pourquoi à peine réveillée me faut il ce besoin de systématiquement tout foutre en l'air? Je baisse les yeux sur mon cathéter. J'arrache le bandage qui cache la seringue, j'arrache celle ci à son tour et je me lève brusquement. Je ne tiens pas debout et je bascule rapidement contre le mur. Je sens ma tête tourner et la désagréable sensation de nausée. J'enchaîne un pas, puis deux, avant de m'écrouler par terre. J'essaie de me relever alors que deux ou trois personnes se précipitent autour de moi et veulent me rallonger. Je m'entends hurler, devenir totalement hystérique, je me vois me débattre sans même en comprendre la raison, je me vois les taper, leur hurler à la figure de me laisser en paix, je sens finalement des larmes couler sur mes joues et je n'arrive plus à prononcer un seul mot. On me tire violemment le bras gauche, et je m'entends crier à la mort, parce que j'ai mal, physiquement, mentalement, dans tout ce que je peux ressentir je ressens de la douleur. On m'enfonce une aiguille et je me vois basculer au sol, la vue se brouillant à la vitesse de la lumière, et je ne vois plus rien que le noir total."


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